Ma pire étourderie pro pour une sortie de single me parait bien dérisoire maintenant… Je vous en parle plus bas.
Comment travailler ? Je vous le demande !
Depuis la semaine dernière, impossible de travailler correctement ou de créer le coeur léger. Même si je tente de couper souvent les réseaux sociaux et n’écoute pas les infos, ça tourne en boucle dans ma tête.
Nahël, la cagnotte pour le policier qui l’a tué, le racisme, les images, des conversations imaginaires avec des fachos, des scénarios catastrophes, comment prendre la parole dans la lutte en tant que personne blanche sans prendre toute la place, la peur de la police, la maman de Nahël, ce que ressentent les personnes qui se font contrôler plusieurs fois par semaine car elles sont pas blanches, la douleur de celleux qui pleurent des morts, toutes ces victimes, les lieux publiques qui crament et donc les populations qui sont impactées et donc on se servira de cet argument pour délégitimer la colère, l’horrible avocat du policier, l’extrême-droitisation de la société, la peur, la prison ferme pour un ado pour avoir été volé une canette de redbull, un pré-ado encerclé par des CRS, ce que doivent ressentir les personnes non blanches avec cet énième déferlement de haine, les comparutions immédiates expédiées pour montrer l’exemple, ce que doivent ressentir les jeunes, les réseaux sociaux que l’autre veut couper comme dans des hum hum dictatures quand la population se révolte.
Voici, à nouveau, la cagnotte pour la famille de Nahël, cliquez pour participer :
Cet article sera foutraque, comme mon esprit l’est.
La société flambe 🔥 Pensées et cœur en vrac
Si quelqu’un-e pense que c’est « trop ceci » ou « trop cela » de dire que “la société flambe” et bien vraiment… je… comment dire…
Entre les violences policières, le racisme décomplexé, le changement climatique qui s’accélère, les guerres partout tout le temps, CNews et Valeurs Actuelles, le renforcement des lois atroces anti-LGBTQIA+ aux USA et ailleurs, les exilé-es qui meurent en mer, les groupes de néo-nazis dans les rues des villes de France qui aident les policiers à mater les manifestant-es…
Et bien vraiment… si vous trouvez que la société ne flambe pas… j’ai envie de vous dire ma bonne dame, où va le monde ?
La société flambe, non ?
Oui, le monde est plus en paix qu’il y a 200 ans.
Mais ça nous avance à quoi de relativiser de la sorte les souffrances actuelles ?
À quoi cela me sert de me dire que si il n’y avait pas eu la guerre d’Espagne, ma grand-mère n’aurait pas eu à sauver sa peau et à fuir son pays en clandestine, que je n’existerai pas et que je serais triste de cette hypothèse ?
Il aurait mieux valu que la guerre d’Espagne, les morts et les souffrances qu’elle a entraîné n’aient pas lieu.
Je préfère une non-vie dont je ne peux pas être consciente plutôt qu’un passé de souffrances.
Ne faut-il pas espérer encore et toujours la paix dans le monde ?
Comment font les autres pour continuer à fonctionner tranquillement ?
Qui vit tranquillement en ce moment ?
Suis-je trop anxieuse ou les autres sont-iels trop indifferent-es car pas concerné-es ?
D’où vient l’empathie ?
N’est-ce pas indécent d’appeler à un retour au “calme” et à la “normale” alors que c’était déjà un chaos pas jojo à la base ?
…
…
Je ressors un passage de l’un de mes anciens articles pour me redonner du courage :
Cette quête pour la lumière et l’équilibre ne cessera sans doute jamais. D’autres épreuves s’imposeront. Le drame de l’existence perdurera tant que l’humanité anéantira le vivant par apathie, égoïsme ou despotisme.
Je ne peux et ne veux me résoudre à baisser les bras.
L’amour est là, “partout où tu regardes”1
Il ne fait pas disparaitre les blessures et ne stoppe pas les guerres mais il insuffle le bonheur simple et le plaisir sur l’instant.
C’est pour préserver la possibilité des instants apaisés que je tiens bon.
Ok. J’ai sorti cet article le 9 juin, y’a pas si longtemps et voilà déjà l’épreuve. Mamma Mia…
Alors je pense à ce qui me ferait du bien sur l’instant avant qu’une autre vague d’anxiété me prenne.
- Où est le chat ? Ah te voilà ! Allez, viens on joue !
- Miaouuuuuuuuu
Se renseigner quand même car c’est plus fort que nous
fait une fois de plus un travail phénoménal avec ces articles du moment sur les violences policières, le racisme et les émeutes.Voici un article utile face à l’argument de l’utilisation de la non-violence pour protester “plutôt que de s’adonner à la violence sauvage…” et vas-y qu’on cite Martin Luther King sans vraiment bien connaître sa pensée :
publie aussi des articles narrant des homicides commis par les forces de l’ordre qui démontent tous les arguments à la “oui mais”.Ces articles sont tristes et choquants. Lisez-les si vous ne sentez pas déjà un trop plein...
a publié un très beau texte sur le “Paradoxe de la tolérance”. Il éclaire d’une manière quasi philosophique ce qu’il se joue dans notre société en ce moment.Il m’a aidé à affermir mon opinion selon laquelle ça n’est pas parce qu’on est ouvert-e d’esprit et tolérant-e qu’on doit accepter l’intolérable.
C’est le moment pour moi de me procurer certains des livres de ma liste d’envies littéraires : Voracisme de Nicolas Kayser-Bril, Les damnés de la terre de Frantz Fannon, Je sais pourquoi chante l’oiseau en cage de Maya Angelou, La prochaine fois le feu de Jame Baldwin, Ceux qui ne sont rien de Taha Bouhafs.
Je cite tout ça pour vous donner des idées et pour vous inviter à donner des recommandations en commentaires, pas pour tomber dans la prétention érudite de bonne militante déconstruite.
ACABadabra
J’ai lu Des paillettes sur le compost de Myriam Bahaffou il y a deux semaines.
Ce livre m’a fait énormément de bien.
Il m’a entre autre permis de connecter ma spiritualité, mon amour de la nature (et celui pour mon chat) avec plusieurs de mes engagements, croyances et valeurs fortes.
Peu de temps avant, j’avais été à la librairie Un livre et une tasse de thé à Paris et d’une manière assez magique, juste en tournant la tête, je suis tombée directement sur Rêver l’obscur de Starhawk.
Je n’avais jamais eu vent de cette personne. Starhawk est une écrivaine blanche des USA éco-féministe néo-païenne se revendiquant sorcière (beau programme).
Je lis - ou plutôt je dévore - Des paillettes sur le compost.
Myriam Bahaffou fait référence à Rêver l’obscur justement.
J’adore ces hasards auxquels j’aime donner du sens. Être artiste, selon moi, c’est aussi créer des liens magiques et symboliques entre des évènements.
Puis...
Nahël est tué par un policier. La France et nos coeurs s’embrasent.
…
J’essaye de trouver de la lumière tous les soirs. Je n’y arrive pas.
Je traîne sur Instagram. Je tombe sur un moment de musique très beau par Claire B au chant et Elmore Fé à la guitare classique à découvrir ICI.
En description, on peut lire “le refrain de l’année contient 4 accords” : La Do La Si soit ACAB2 pour la notation anglo-saxonne.
Je cours à mon piano tenter une version VoxAxoVienne. Je sens que ça va devenir quelque chose. Je me dis que ça pourrait créer un mouvement général de compositions anti-violences policières.
Je fais une grosse insomnie alors je commence Rêver l’obscure.
Ce livre tente de relier le spirituel et le politique, ou plutôt d’accéder à un espace au sein duquel cette séparation n’existe pas, où les histoires de dualité que nous raconte notre culture ne nous vouent plus à répéter les mêmes vieux scénarios.
C’est exactement ce que je tente de faire avec VoxAxoV de manière artistique.
Je me terre le lendemain dans le studio et commence à produire un morceau que je pense intituler ACABadabra.
Et ma pire étourderie pro dans tout ça ?
Je craignais d’en parler. Je me disais qu’un aveu de faiblesse professionnelle peut porter préjudice à une carrière.
Comment des partenaires pro pourraient me faire confiance si iels savaient que je suis capable de commettre une telle erreur ?
J’ai demandé aux membres du Club des Vies d’Artistes sur notre Discord si je devais le faire. Réponse : oui, bien entendu.
Surtout… aux vues de ce qu’il se passe, ma bourde me paraissait tellement, mais tellement, mais tellement dérisoire.
N’est-ce pas une force d’avouer ses faiblesses ?
Il m’a fallu quand même plus de 6 jours pour écrire cet article à cause des évènements.
Bon allez. À votre avis, c’est quoi cette bourde ?
En matière de sortie digitale d’un single, quelle pourrait être la pire gaffe que l’on puisse faire ?
Le temps que vous trouviez la réponse, écoutez Like I should, le dernier single de Roger Valentine, sorti sur mon micro label Golden Grey :
Alors ?
…
…
Oui !
…
Oui…
Début juin, sur l’espace privé de mon label sur le site de mon distributeur digital, j’ai mis en ligne le mauvais fichier son du single.
Mamma Mia, j’ai honte…
…
Posez-vous un instant et imaginez la chose pour une de vos sorties…
…
Ça fait mal, très mal, hein ?
Genèse et gestion de la bourde
J’étais sensé mettre en ligne ce fichier :
RogerValentine-LikeIshouldRadioEdit-44100hz-16bit-FR9W12328433.wav
et à la place, apparement, j’ai mis celui-là :
RogerValentine-Destination- 44100Hz-16Bits-FR9W12206164.wav
Le vendredi 30 juin vers midi, jour de sortie du single, Roger Valentine et moi-même échangeons sur Whatsapp (retranscription de notre communication approximative) (flemme de rechercher dans l’historique de notre conversation infinie) :
- Alors, le post Instagram c’est fait… trop drôle ahah
- Faut mettre à jour le lien dans la bio…
- Oui… Attend Groover me fait des supers retours, là !
- Et oui !! C’est parce que j’ai personnalisé à mort les messages. Trop bien !
- Ok, il reste quoi ?
- Attend… je regarde la liste… T’as mis à jour le lien Linkfire sur Soundcloud ?
- Euh… attend, c’est pas le bon son ??!!
- Quoi ??!!?
S’ensuivent le stress, la missive urgente à Wiseband le distributeur (qui a très bien géré l’affaire soit dit en passant), le changement de dernière minute du plan de communication.
Le bon fichier son était en ligne sur toutes les plateformes entre vendredi et samedi.
Comme si de rien n’était : communication sur les réseaux le lendemain, idem pour les contacts média et playlists (qui avaient eu le bon fichier son en écoute privée sur Soundcloud et le bon fichier audio à télécharger pour le coup).
Problème résolu en moins de 24h, facilement.
Si votre distributeur digital vous dit que c’est impossible ou compliqué, c’est un mensonge.
Cela arrive à d’autres (et aux gros poissons aussi). L’erreur est humaine.
Cela ne m’arrivera plus jamais. JAMAIS. J’espère… 😩
Heureusement que Roger Valentine est compréhensif et relax. Il prend son projet artistique avec beaucoup de lâcher prise, voir une quasi innocence.
Heureusement que le projet vient de naître et n’a pas encore des milliers de followers. Et même si c’était le cas, on aurait géré.
Heureusement que le mauvais morceau n’était pas un titre de Patrick Sébastien mais le précédent single de Roger.
Ce qui est drôle dans tout ça, c’est que les paroles de la chanson font étrangement écho à nos erreurs incroyables et à ce désir de tout faire bien qui nous ronge.
I will clean the mess
And do it Like I should
Je vais ranger le désordre
Et faire les choses comme il faut…But still I am sit-in on my floor
Mais je suis toujours au sol…Going nowhere
Just wasted
Always fail…
Aller nulle part
Toujours défoncé-e
Toujours l’échec…Someday I will do it like I should…
Un jour je ferais les choses comme il faut…Like I should…
Comme il faut…Like I should…
Comme il faut…
On peut m’entendre faire des choeurs et des voix transformées sur cette chanson qui a connu peut-être 326 versions différentes. Le clip, hyper décalé, sortira la semaine prochaine en version longue. Affaire à suivre !
Sortir un single quand la société flambe ?!
J’aime beaucoup Like I should. J’aime collaborer avec Roger Valentine car il prend les choses comme elles viennent. On s’était bien amusé pour les sorties précédentes.
Mais, cette fois-ci, à cause des évènements, je ne ressentais pas du tout le même enthousiasme.
Je n’avais pas la motivation de partager les nouvelles de la sortie. Mes comptes Instagram ont surtout relayé du contenu relatif à Nahël et aux violences policières. Ou rien.
Cela me semble si dissonant de célébrer une sortie de single dans des temps aussi sombres.
Je me remémore les évènements reportés pour cause de crises diverses.
Je comprend tellement cela.
Desfois, on remet à plus tard car il nous faut du silence. Beaucoup de silence.
Beaucoup de minutes de silence.
Il nous faut quitter pour un temps les réseaux et parler en chair et en os aux autres pour élever les âmes, apaiser les cœurs, combattre, soutenir.
Comment faire quand les réseaux sociaux sont notre vitrine professionnelle mais aussi celle de ce qu’il se passe dans la société ?
Faire comme si de rien n’était, ça, je ne peux pas.
Que faire ?
Comment travailler en tant qu’artiste quand la société flambe ?
Je ne sais toujours pas vraiment.
Mais bon.
D’un point de vue strictement productiviste et fonctionnel, ça ira pour aujourd’hui :
J’ai enfin fini l’article le plus foutraque de l’histoire de mon blog.
J’ai enfin partagé le single de Roger Valentine qui aura eu l’honneur d’être sorti via ma plus grosse étourderie professionnelle.
Je ne suis plus du tout affectée par cette étourderie. C’est tellement rien comparé aux “vrais problèmes”.
On n’en finit jamais d’apprendre
D’apprendre à se lâcher la grappe avec la réussite, les il faut y’a qu’à, les like I should, les injonctions et patati et patata.
Quand les cataclysmes sociétaux nous renversent, qu’est-ce qui vaut vraiment la peine ? L’harmonie ma bonne dame, pas un nombre incroyable de streams, c’est moi qui vous le dit !
D’apprendre à d’abord bien mettre son masque à oxygène sur soi et, ensuite, à aider les autres à mettre le leur.
Puis AGIR comme on peut, mais agir quand même comme on peut mais agir quand même, comme on peut, MAIS AGIR car l’urgence est réelle.
L’urgence est réelle.
Et puis aussi : ACABadabra la violence disparaîtra.
J’y crois comme je crois aux licornes. Parole de Licorne de Troie.
“L’amour est partout où tu regardes” phrase tirée de la chanson “Je t'aimais, je t'aime, je t'aimerai” de Francis Cabrel.
ACAB, acronyme de l'anglais « All cops are bastards » (« Tous les flics sont des salauds »), est un slogan anti-police popularisé durant la grève des mineurs britanniques de 1984-1985. ACAB est parfois remplacé par le nombre 1312, en référence à la position des quatre lettres dans l'alphabet latin.
Source : Wikipedia.
Bel article.
Il y a quelques temps, un de mes auditeurs, qui tient une petite maison d'édition, m'écrivait dans une conversation : "Nous créons de la beauté pour faire face aux choses".
Pour moi, il a résumé en une phrase le sens profond de la création artistique vis a vis du monde et de ce qui s'y passe.
Créer quand le monde flambe, c'est nécessaire. Pas suffisant, mais nécessaire.