Le lundi 16 décembre à 10h30, invité-e par La GAM1, j’ai pris la parole avec Suzanne Combo et Emily Gonneau pour la commission d’enquête sur les violences sexistes et sexuelles dans le milieu de la musique présidée par Sandrine Rousseau et dont le rapporteur est Erwan Balanant.
Pour regarder l’audition : https://bit.ly/AuditionVSSAssembléeGAM
J’ai tenté de trouver un moment où nous n’avions pas un visage très solennel et sérieux. Je l’ai trouvé à 23min55sec quand sous le coup de l’émotion, j’ai dit “Sandrine” à la place de “Suzanne” pour désigner ma “consœur”.
Faute de temps, nous avons dû raccourcir nos prises de parole. Je vous partagerai l’intégralité de la mienne dans un prochain article. Nous allons fournir à la commission plus de contenus sur le sujet. Cette audition n’était qu’un commencement.
Émotions Fortes
Enfant, je m’imaginais faire des concerts partout et même dans l’espace. Jamais je ne me serais imaginé-e parler à l’Assemblée Nationale. Pour autant, ça fait sens. J’ai souvent été délégué de classe et dit avec une certaine prétention naïve “je voudrais changer le monde”.
J’avais peur de parler car - comme je le dis durant mon intervention, “toute personne qui prend la parole à visage découvert prend des risques”.
J'avais aussi peur de ne pas réussir à m’exprimer correctement, submergé-e par l'émotion. Le sujet me touche si profondément.
J’avais aussi peur de potentiel-les membres du Rassemblement National venu-es en découdre avec de satanées féministes. Nous avons crû en repérer un seul : un monsieur qui a passé tout le temps de notre audition sur son portable. Peut-être faisait-il seulement acte de présence.
Notre audition s’est relativement bien passée. Les personnes présentes étaient bienveillantes et impliquées. Sandrine Rousseau est venue nous saluer à la fin.
Au sortir de l’audition, devant l’Assemblée, Emily, Suzanne et moi-même nous sommes enlacé-es. Sororité. C’était fort.
Je remercie mon cher Mickaël Burlot de nous avoir donné de précieux conseils pour l’audition en amont.
Les messages de soutien ont été nombreux avant et après. Merci ❤️
Je suis soulagé-e que ce moment soit passé. J’ai l’impression qu’il clôture quelque chose pour moi.
Mais !
Avec Emily et Suzanne, nous n’avons pas pu nous empêcher de nous rendre compte, une fois de plus de l’ampleur colossale de…
… notre travail bénévole !
Nous n'avons pas été rémunéré-es pour cette prise de parole. Nous avons simplement fait notre devoir de citoyennes.
Cela ne devrait pas vous choquer.
Si Emily, Suzanne et moi-même sommes aussi éclairées sur le sujet, c'est parce que, depuis des années, nous y travaillons déjà bénévolement, surmontant au passage les reviviscences traumatiques que cela peut engendrer, tout en vivant ces discriminations de genre.
C’est la double peine. Ah non, la triple.
Ma panne de chauffage
Ayant prévu de travailler chez moi la semaine précédant la prise de parole, j’ai pu tout déplacer pour m’y concentrer à fond, bénévolement. Dans une maison froide.
Ma maison (enfin ma passoire thermique) est chauffée au fioul. Cette année, la chaudière, assez âgée, est retombée malade.
Je vous rassure. Le chauffagiste a réparé la panne le jeudi suivant. Et depuis plus de 10 ans que j’habite dans cette maison, j’ai l’habitude des coupures de chauffage. J’ai des chauffages d’appoint et j’ai développé toute une série de stratégies pour y habiter quand elle se transforme en igloo.
Le fioul est cher (environ 500€ pour 500 litres, le minimum pour une livraison). Pour pouvoir en commander, je me retrouve souvent à devoir attendre le début du mois (quand le RSA est versé) ou que des factures soient enfin réglées. Je paye souvent le fioul en plusieurs fois. Malgré leur modeste retraite, mes parents m'aident parfois depuis mon arrêt maladie, alors que j'ai 43 ans.
Quoi qu’il en soit le contraste est fort : avant de me rendre à l’Assemblée, j’ai bu mon café dans une cuisine / chambre froide avec le radiateur soufflant au dessus de mes jambes.
Qu’est-ce que ces considérations viennent faire dans ce blog ?
Le privé est politique.
Ma précarité financière d’artiste,
amplifiée par mon genre et mes traumas,
me contraint à investir mon énergie dans la guérison et le militantisme non rémunéré,
ce qui freine ma carrière,
alimente encore plus cette même précarité,
et m’expose à des risques supplémentaires liés à mon engagement.
Je ne peux pas continuer ainsi
(et vous non plus)
Soit je vais faire un burn-out. Soit je vais devoir arrêter ce blog. Soit je vais faire banqueroute. Soit je vais devoir m’endetter.
Je ne veux pas de tout cela. Personne n’a à se sacrifier pour l’art et pour la cause.
L’Empire a élaboré de malicieuses stratégies pour, qu’au final, nous vivions nos souffrances d’artistes et de personnes opprimées comme si elles “allaient de soi” ou en se disant “qu’il y a pire que nous”.
Pendant ce temps, l’Empire vit sa meilleure vie, nous isole et nous précarise plus.
ALORS CERTES
Je ne vais pas, en un clin d'œil, pouvoir rattraper économiquement ces longs mois passés à me soigner, à soutenir des proches dans le besoin ou à régler des affaires juridiques.
Je ne vais pas non plus combler l’écart de rémunération entre les genres qui m’impacte.
Je ne vais pas pouvoir me mettre à gagner beaucoup d’argent avec mes différents projets artistiques car je suis encore en phase “d’investissement” et de “prospection” et que… Spotify -_-
Mes parents ne vont pas devenir riches du jour au lendemain. Même si mon père y croit dur comme fer en planchant sur de nouvelles chansons qui lui permettront de toucher des droits d’auteur mirobolants et en jouant au loto avec constance ❤️
Mon trouble psy ne va pas disparaître comme par magie. Il m'handicape à bien des égards. Je dépose mon dossier de demande d’AAH à la MDPH2 en janvier3. Ça va prendre du temps et ma demande sera peut-être refusée.
ALORS VOILÀ
Même si je ne peux pas m’empêcher de penser qu’il y a bien pire que moi et que les temps sont durs pour tout le monde.
C’est normal et tout à fait légitime. Je dois…
Vous demander du soutien et de l’argent !!
À la fin des prochains articles, vous découvrirez différentes façons de me soutenir, financièrement ou de manière immatérielle. Chaque article mettra l’accent sur un aspect en particulier.
Aujourd’hui :
Focus sur les Dons PayPal
C’est ici que ça se passe : paypal.com/paypalme/CharlotteCegarra
À propos des dons électroniques
Selon moi, on devrait y avoir recours plus souvent pour les artistes.
Ça me rappelle l’époque où je chantais dans la rue Place Des Vosges. C’était si encourageant et agréable de recevoir des sous, même un tout petit montant de 50cts ou 1€.
Durant les période de création et de production intenses, nos finances d’artistes indés sont souvent instables.
Dans notre société capitaliste, les dons montrent qu’on n’est pas en train de créer dans le vide et peuvent réellement permettre de financer nos projets.
Au-delà des campagnes de crowdfunding qui impliquent un “rendu” (nécessitent un travail colossal et sont très anxiogènes), les dons nous montrent qu’on est méritant-es.
Personnellement, je suis tellement habitué-e à rendre service ou à me dévaluer que j’oublie toujours que je mérite du soutien sans rien devoir en retour. Cela vous parle ?
Chose hilarante : Spotify a mis en place la possibilité de faire des dons PayPal aux artistes sur leurs profils Spotify. C’est une sorte d’aveu de leur médiation défaillante : “on ne paye pas justement les artistes pour leur travail, alors donnez-leur des sous, nous on s’est déchargé de ce problème, bisous”. C’est un peu comme si un restaurateur vous servait un repas gratuit mais vous suggérait de glisser un billet directement dans la poche du chef en cuisine, parce que lui-même refuse de le rémunérer (correctement).
Trop peu de personnes ont pour le moment souscrit à l'abonnement payant de ce blog pour que je puisse en dégager un complément de revenu. Les dons ponctuels, même modestes, permettent de me soutenir sans nécessiter d'engagement, si c'est un point bloquant pour les lecteur-ices de ce blog.
Je fais souvent des dons pour des cagnottes solidaires, aux artistes en ligne ou dans la rue, pour Wikipedia. Je donne de petits montants, parce que je n’ai pas les moyens de faire plus. Mais je sais que ça compte.
Voici, en vrac, les autres moyens de me soutenir !
Il faut cliquer sur les mots soulignés pour le faire.
Pour une somme entre 1€ et 1 milliard d’euros
Prendre l’abonnement payant à ce blog. Organiser une cérémonie de VoxAxoV en commençant par envoyer un mail à Lilian Dupont, booker. Me faire parler lors d’une conférence, me demander d’animer un atelier ou une Masterclass, m’envoyer un mail. Acheter sur Bandcamp du merch de VoxAxoV ou le 1er single de Flower Fighter de Charlotte&Magic, mon ancien groupe. Acheter le merch physique du Kilimanjaro Darkjazz Ensemble, mon autre ancien groupe. Acheter la Checklist Concert. Prendre un RDV Mise Au Point avec moi, m’envoyer un mail.
Pour 0€ et un peu de votre temps
Un abonnement à la chaîne YouTube de VoxAxoV et/ou un commentaire sous une de ses vidéos. Un abonnement à la nouvelle chaîne de Charlotte&Magic. Faire découvrir VoxAxoV ou Charlotte&Magic à une personne qui ne connaît pas. Le partage de l’un des articles de mon blog. Un abonnement à la newsletter de VoxAxoV, à celle de Charlotte&Magic. D’autres manières de me soutenir auxquelles je n’ai pas encore pensé.
Pour conclure
Vous n’imaginez pas combien de temps j’ai mis à écrire cet article. Vous n’imaginez pas comment je dois surpasser ma peur “d’avoir l’air de quémander”, de “trop en mettre” ou de “noyer l’information”. Merci
de pour la relecture de cet article 💜Cependant, comme avec pas mal de mes articles qui m’ont demandé une immense implication en terme de temps et d’engagement personnel, je sens que je tiens quelque chose qui sera utile pour toustes.
Je commence une réflexion générale sur la difficulté du métier d’artiste.
Sur ce blog et dans mes prises de paroles diverses, je l’ai toujours abordé par touches éparses ou en traitant de problèmes transversaux (l’agisme, les réseaux sociaux, la santé mentale etc.) mais je commence à mettre des mots sur les maux spécifiques qui nous rongent, en tant que classe sociale et catégorie de travailleur-euses.
Ces deux derniers mois, j’ai entendu une quantité beaucoup trop importante d’artistes me raconter la souffrance immense qu’iels ressentent vis-à-vis des difficultés de leur métier. Sûrement à cause de l’ambiance politique mondiale, de la crise du booking, de Spotify, de la dépression saisonnière, des fêtes de fin d’années, de la baisse des subventions à la culture, du danger pour la culture dans les Pays de la Loire, de l’affaire Pélicot, du nouveau gouvernement etc.
Il nous faudrait, encore et toujours, nous redonner, ensemble, un espoir global pour notre métier. En imaginant, ensemble, un monde de la musique juste et radieux malgré le chaos ambiant.
Sans imaginaire, impossible de ressentir de la joie.
Sans joie, impossible de surmonter les difficultés du moment.
Oui, j’ai enfin finir de lire Joie Militante4 et ce livre m’a beaucoup inspiré.
J’ai été aussi inspiré par notre prise de parole à l’Assemblée, le témoignage de Flore Benguigui à Médiapart, l’amour de ma famille et de mes proches, les discussions avec Les Chevalières de la Table Rectangle et avec mes ami-es artistes, la lecture de
et l’acceptation que l’extrême droite accédera sûrement au pouvoir en 20275.Plonger et faire plonger dans l’imaginaire, c’est notre métier non ?
Alors imaginons, ensemble.
On tient le cap ! À l’année prochaine !

La GAM, la Guilde des Artistes de la Musique, est l’organisation professionnelle française qui fédère les femmes et les hommes auteurs, compositeurs et interprètes de toutes les générations et de toutes les esthétiques musicales.
Pour adhérer c’est ICI.
L'Allocation aux Adultes Handicapés (AAH) est une prestation sociale destinée à garantir un revenu minimal aux personnes en situation de handicap, sous conditions de ressources. La Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH) est un guichet unique permettant d'accompagner et d'orienter ces personnes dans leurs démarches, notamment l'accès à l'AAH.
Le traitement des dossiers de demande d’AAH dure de 4 à 5 mois sur le papier mais peut parfois jusqu’à plus de deux ans dans la vraie vie. Une demande peut être refusée.
Joie militante de carla bergman & Nick Montgomery traduit de l’anglais par Juliette Rousseau. En savoir plus ICI.
Les personnes privilégiées devraient arrêter de vivre dans le déni : la France est majoritairement raciste, transphobe, homophobe, misogyne etc. Je me prépare à ces élections présidentielles quand j’ai la force. Je ne serais pas pris-e de court comme avec la dissolution. Ça ne m’empêchera pas de lutter à ma manière pour que l’extrême droite ne passe pas. Au mieux, nous serons agréablement surpris-es. Au pire, “choisissons dès maintenant notre réaction” face à l’éventualité de l’extrême droite au pouvoir. “Cela empouvoire en redirigeant l’angoisse vers l’action solidaire”. Je remercie
pour ces mots dans le groupe WhatsApp du Club Premium de .
❤️👏🏻